[Ballons montés] Deux ballons montés (oblitération du 5 janvier 1871 et du 23 janvier 1871) * adressés à la même personne « Par Ballons/ monsieur Lemaire Ménigot à Villeneuve sur Yonne/ pour Mme Pronier. Deux pages finement rédigés, écriture très facile à lire. Le texte du premier en date du 4 janvier 1871. Après avoir rassuré sur sa santé, l'intéressé relate en détails les habitudes culinaires en temps de siège tout en écrivant ne manquer de rien « Nous ne souffrons pas de la faim, loin de là ; nous ne mangeons ni bœuf, ni poulet, ni gibier, ni poisson mais nous avons du bon pain quoique bien bis, du cheval, du riz, des haricots et des pommes de terre, etc. » (…) « ce que nous mangeons souvent aussi, ce sont des crêpes à l'eau, sans œufs et cuites à l'huile (…) pour nos étrennes ; l'administration nous a donné du bœuf en boite préparé pour les marins (…). Par contre il semble souffrir du froid : « Ce qui est bien dur, c'est le froid à supporter car il fait bien dur. Le combustible est très rare, nous n'avons plus beaucoup de charbon (…) pour conserver le peu qui nous reste pour le calorifère, Marie fait sa cuisine avec du bois ordinaire (…) ». Revenant sur les vivres ; Mr Pronier se félicitant « Heureusement que nous avons été gens de précautions (…) » dénonce l'inflation « (…) une poule 30 francs, un chat pour manger 15 francs, un lapin 40, une paire de vieux pigeons 20 fr » et sens la pénurie venir. « Les marchands d'hiver manquent totalement sur place dans le gros comme dans le détail (…) » s'ensuit des recommandations sur la santé, quelques anecdotes ajoutant en fin de lettre avant de dire adieu « Le canon tonne en ce moment d'une force terrible. C'est le bombardement qui continu de plus belle ». Le second texte date du 22 janvier 1871. Le ton est plus dramatique que dans la lettre précédente et on sent immédiatement que les conditions d'existence sont dramatiques : « (…) Dieu veuille que ma croyance soit justifiée et que vous ne soyez pas condamné comme les parisiens à vivre de 300 grammes de pain noir composé de seigle, avoine, orge, riz et beaucoup de son additionné de 100 grammes de cheval pour trois jours. » pour sa part il se nourrit encore de mouton avec ses proches mais en toutes petites portions et pour le reste remet son destin entre les mains de Dieu. Changeant de sujet ; il relate « Aujourd'hui Paris est presqu'en insurrection. L'insuccès de la sortie tentée il y a deux jours a soulevé les esprits exaltés » dénonçant les risques d'une guerre civile « (…) oh ! la révolution quelle choses épouvantable ! (…) dans une guerre civile est-il possible de les connaitre [les ennemis]. Ils sont partout, à votre foyer, à votre porte, aux fenêtres de votre maison, devant vous, derrière votre dos » après avoir donné son avis en quelques lignes sur la situation politique ; il conclut « (…) il n'est pas d'exemple dans l'histoire qu'une ville se soit débloquée sans secours du dehors » ; revenant sur la souffrance des assiégés et dénonçant la spéculation et les spéculateurs « (…) les pauvres gens souffrent beaucoup. On mange du chien, du chat, du rat. Le chien se vend 4 fr la livre et c'est une viande malsaine (…) que notre voisin meure de faim, cela ne fait rien pourvu que l'on s'enrichisse. Beaucoup de pauvres gens ne vivent que de vin sucré (…) avec cela le pain est mauvais car il est comme une colle et lourd comme le plomb. » s'ensuit les recommandations sur la santé et les adieux. Beaux exemplaires. * Ce qui semblerait correspondre aux ballons « Le Duquesne » et « Le Toricelli » Expertise réalisée par Monsieur Pascal GUILLEBAUD.
Estimation : 100 - 200 €