[Jean Jaurès] « Le prolétariat et la patrie ». [Jean Jaurès] Article (épreuves manuscrites) non daté et non signé* intitulé « Le prolétariat et la patrie » destiné à la publication ; 14 feuillets in-4 (rectos seuls manuscrits ; certains coupés pour les besoins de l'imprimeur). Calligraphie nerveuse quelquefois très difficile à déchiffrer ; des ratures et corrections. Bon à tirer et instructions au crayon bleu. Jaurès s'interroge de savoir comment peut-on résoudre les problèmes [notamment entre la France et l'Allemagne] afin de conserver la paix et de promouvoir dans le même temps le désarmement général « (…) Voilà les questions qui sollicitent l'esprit public et qui bientôt l'obséderont. Ce faisant la voix du parti socialiste ; il annonce « [qu']il doit répondre sans ambiguïté, sans réserve, sans faiblesse (…) » et « (…) éviter de tomber dans les outrances du langage » dénonçant dans le passage suivant l'excès patriotique ; Jaurès oppose « (…) le mépris qui est la seule réponse qui leur convienne (…) continuant par « Il n'y a qu'une seule méthode à la fois probe et prudente : c'est d'essayer d'aller au fond même des problèmes sans timidité et sans violence (…) » puis il développe longuement une certaine idée de Patrie dans le prolétariat « (…) Ce n'était pas le reniement de l'idée de patrie (…). Les pauvres, les déshérités, les opprimés voulaient signifier qu'ils ne tenaient aucun droit au patrimoine commun qu'ils étaient les sans patrie parce qu'ils étaient les sans droit et les sans propriétés (…) Ils s'appliquaient à eux-mêmes les fortes paroles de Jean Jacques Rousseau qui dans le même article de l'Encyclopédie ou il combattait le cosmopolitisme constituait la patrie sur un minimum de droit » dénonçant plus loin « (…) une patrie de classe et de privilège, l'égoïste foyer de quelques-uns et non le large foyer de tous » et de citer longuement Marat en novembre 1789 « (…) Ou est la patrie de ceux qui n'ont aucune propriété, qui ne peuvent prétendre à aucun emploi, qui ne retirent aucun avantage du pacte social ? » (…) » que pourraient ils donc devoir à l'état qui n'a rien fait que cimenter leur misère et river leurs fers ; ils ne lui doivent que la haine et les malédictions (…) parlant de la Bastille « C'est écrit Marat un sujet de réflexions singulières pour le philosophe que l'ardeur avec laquelle de malheureux ouvriers ont exposé leurs vies à détruire ce monument de la tyrannie (…) » puis de la fête de la Fédération « (…) qui créa l'unité de la France révolutionnaire (…) ». Jaurès rappelle l'opposition de Marat au service militaire par ces paroles véhémentes « ou est la patrie de ceux qui n'ont aucune propriété » ? et reprochant à « la bourgeoisie révolutionnaire » le refus aux pauvres du droit de suffrages qui « créa 3 millions de citoyens passifs » déclamant enfin que « (…) la patrie à la même étendue que le droit ». Dans un dernier passage ; Jaurès continue son rappel historique évoquant entre autres Fourier (…) « qui dénonça la rupture même du pacte social par l'égoïsme bourgeois » puis tel le tribun qu'il était déclame sous la plume « C'est nous que vous craigniez ; nous décrétés passifs, inactifs, c'est notre (activité ?) que vous appréhendez. Oh ! mes frères c'est la peur de Caïn… Car en effet le décret qui nous exclut des assemblées primaires, qui nous sépare de vous et nous frappe d'une mort civile est un véritable fratricide qui ne peut rester impuni » concluant par : « Ainsi dés que le prolétariat en qui la conscience de classe s'éveille à peine commence à protester contre les lois d'exclusion et de privilège ; il crie à l'injustice sociale qui le met hors de la société, hors de la patrie : Pour lui d'emblée la patrie se confond avec le droit. ». Petites déchirures en dernière page en marge gauche sans manque de lettre sinon excellente condition. *Un certificat d'authenticité sera délivré sur demande. Expertise réalisée par Monsieur Pascal GUILLEBAUD.
Estimation : 800 - 1500 €